dimanche 5 juillet 2020

Les pieds des photographes

La Verendrye au lac des Bois (détail), Arthur H. Hider (1870-1952),
Bibliothèque et Archives Canada

Entourés de leurs armées ou seuls à cheval, Pancho Villa ou Napoléon s’affichent à l’aise sur la photo de l’histoire. Mais La Vérendrye n’a pas d’armée ni de cheval. Il est juste un découvreur à coup d’aviron, un homme qui parle aux Indiens.

Antoine Champagne, l’un des rares ‘photographes du passé’ fascinés par La Vérendrye, remarquait en 1968 : « Chose étonnante au premier abord, il y a cent ans le découvreur de l’Ouest était pratiquement inconnu ». Et la situation était la même au moment de son commentaire… et actuellement.

La documentation historique est toujours fuyante, comme le temps lui-même, un naufrage constant de guerres et d’incendies auxquels le papier survit à peine. Lettres, journaux, actes notariés, mémoires, tout effacé par l’eau, réduit en cendres, broyé par la haine ou l’ignorance.

Mais il y a pire : le lavage de l’oubli. L’oubli d’un homme simple qui savait parler aux Indiens dans leur langue, avec des gestes qu’ils comprenaient et appréciaient. Non, La Vérendrye ne faisait pas bonne figure pour la photo habituelle. Il était condamné à rester hors cadre, flou dans sa simplicité d’homme normal et tenace.

Laissons parler néanmoins deux de ses meilleurs ‘photographes’, qui ont su déceler son étoffe derrière son esprit de négociation et non-violence.

 

Georges Dugas
(Saint-Jacques-de-l’Achigan, 1833 - Sainte-Anne-des-Plaines, 1928)

Georges Dugas est le premier. Homme d’Église qui n’a pas la langue dans sa poche, il est envoyé comme missionnaire à la rivière Rouge (sur la route de La Vérendrye !), où il est témoin du mouvement de résistance de Louis Riel en 1869. Vingt ans plus tard, il prend sa retraite dans son Québec natal et se consacre à l’écriture de ses souvenirs : des légendes du Nord-Ouest, des récits de la vie des voyageurs, son magnifique L’Ouest canadien (1896), dont une bonne partie est dédiée à La Vérendrye, l’histoire du mouvement des Métis de la rivière Rouge, tout avec la plume agile et acérée du ‘photographe’ qui a connu les faits de première main et qui peut mettre les pieds dans la photo… en homme d’Église, en québécois, en simple défenseur de la vérité qu’il a vue.

 

Antoine Champagne
(Manitoba, 1892 - 1980)

Le Manitobain Antoine Champagne est le deuxième. Un profil comparable d’homme d’Église, bref séjour au nord du Québec, douze ans en Europe, retour à Manitoba comme curé, très productive retraite de recherche sur l’histoire de l’Ouest : ses volumes Les La Vérendrye et le Poste de l’Ouest (1968) et Nouvelles études… (1971) ont une richesse de documentation et une précision d’écriture vraiment admirables. Met-il aussi ses propres pieds dans la photo de La Vérendrye ? À peine, mais oui, à coup de passion, de révolte contre l’oubli du personnage. Et à coup de documentation, énorme et toujours pertinente.

Ils sont bien ces deux ‘photographes du passé’. Grâce à eux, La Vérendrye a pu rentrer dans le cadre de la photo.


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mercredi 1 juillet 2020

Un homme et son cheval regardent la mer

El último de Gibraltar, Augusto Ferrer-Dalmau, 2011
(contenu libre Wikimedia)

Lundi 4 août 1704. Diego de Salinas est seul avec son cheval sur la plage de Gibraltar. Ni lourd ni aérien : il a le cœur vide. Il vient de signer la reddition du ‘Peñón’ de Gibraltar, qu’il défendait –avec une garnison de 100 soldats espagnols, 400 civils armés et quelques marins français– contre une armada anglo-néerlandaise de 34 000 hommes et 4 000 canons.

Les défenseurs ont été laissés à eux-mêmes. On espère d’eux qu’ils feront belle figure de résistants acharnés devant l’historiographie future ? Ça fait toujours de belles histoires patriotiques…

Diego de Salinas tient bon depuis le 1er août, mais les forces de la flotte débarquent et prennent en étau le sanctuaire de Notre Dame de l’Europe, au sud de la forteresse, où femmes et enfants étaient réfugiés.

À l’inutilité flagrante de l’héroïsme s’ajoute alors le non-respect habituel de la vie des civils, démontré par les envahisseurs dans des occasions récentes. Ceci ne laisse plus de place à l’hésitation et Salinas ordonne arborer pavillon blanc…


Garder les regrets, se savoir dorénavant un lâche pour les siens, savoir surtout que le Peñón’ était perdu… pour toujours ? Salinas et son cheval regardent le soleil couchant de ce 4 août 1704 avant de partir, les derniers.

Quatre années plus tard, le jeune trifluvien Pierre Gaultier de Varennes et de La Vérendrye (1685-1749) s’enrôle dans la même guerre, celle de Succession de l’Espagne, du même côté des perdants. Il est blessé et fait prisonnier à la bataille de Malplaquet (1709) avant de pouvoir retourner en Nouvelle-France, sans le sou, en mai 1712.

Dans ses terres de La Gabelle, près de Trois-Rivières, il commence à faire la traite de fourrures avec les Amérindiens et, à partir des informations qu’il reçoit d’eux, à concevoir sa quête de la mer de l’Ouest. Reçoit-il des appuis malgré l’importance stratégique de ce projet ? Les mêmes que Salinas à Gibraltar : aucun. Décidément l’histoire –le petit groupe de privilégiés qui décident les choses– préfère s’armer de paperasse et calendes grecques, laissant les faits impossibles aux autres, quitte à les récupérer une fois morts en héros.

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samedi 11 avril 2020

Le paysage intérieur

 

Il n’y a pas de doute, on est à un pas de la philosophie dans ce confinement de mars et avril, propice à la réflexion, voire à l’autoréflexion et aux questionnements comme celui-ci : qu’est-ce qui constitue la trame de notre personnalité ?
Nous sommes d’abord notre réseau de famille et d’amis. Il y a aussi nos lieux habituels, nos savoir-faire, nos souvenirs courants, récents. Dans une pelure un peu plus profonde, il y a l’amour et les souvenirs anciens, touchés d’une musique particulière. Mais au noyau de la conscience de soi, il y a surtout deux choses : le schéma corporel et le paysage intérieur.
Le schéma corporel est comme notre photo 3D –soumise à une forte distorsion comme on le verra– qui garde nos gestes les plus caractéristiques, notre démarche, notre façon de regarder, notre intonation… C’est notre marque, celle que nous voulons projeter de nous dans notre meilleur angle. Or, cette image nous l’avons travaillée longuement, au moins depuis l’adolescence, mais nous n’avons pas réussi à cacher derrière elle tous nos défauts : nous avons dû nous mentir un peu, en nous attribuant quelques poses de nos acteurs idolâtrés, de nos copines plus brillantes que nous… Ce n’est pas un mensonge, juste un peu de bienveillance, que la masse de photos proliférant aujourd’hui sur les réseaux nous révèle facilement dans sa fausseté.
Centre cérémonial,
castrum Ulaca
(Ávila, Espagne)
Le paysage intérieur, de son côté, n’a rien à voir avec nos lieux habituels. Le paysage intérieur n’existe pas nécessairement sur Terre. Il est un mélange tissé d’abord par des lieux de notre enfance, mais où s’insèrent également les impossibles rêvés d’alors pour partir au loin, à l’aventure de la vie. Le paysage intérieur devient ainsi la matrice spatiale qui nous a incubés en tant que personnes, où s’entremêlent nos jardins lointains, les vieilles comptines, les premières escapades…
Mon paysage intérieur à moi –dans la mesure où je peux le verbaliser– est fait de roches de granit, en haut dans la montagne... Peut-être au vieux pays des Celtes-Vettons, qui construisaient des ‘castra’ inaccessibles, pratiquaient l’élevage et respectaient Épona, la déesse-jument qui prend soin des chevaux, ainsi que des humains lors de leur dernier voyage.
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jeudi 2 avril 2020

Insubordination temporelle


Images de Continuidad de los parques, film d'Alfonso Guerrero, Uruguay, 2008.

Cette histoire est de celles que France adore. Mais elle est trop brève, hélas, une page à peine, et c’est le lecteur qui doit construire les personnages, trouver les motivations, ajouter la localisation… et, de plus, retomber sur ses pieds –si possible– après le réveil de la fin.
En parlant l’autre jour, ici même, de la fâcheuse habitude de bifurquer qu’ont les sentiers du temps, je me devais d’évoquer une autre insubordination temporelle, encore plus insidieuse, celle de la ‘Continuité des parcs’, titre innocent de Julio Cortázar (1914-1984) sous lequel se cachent de subreptices points de passage d’un univers à un autre.
Et quelle fin, celle de son histoire ! Ce n’est pas gentil de couper court avec une finale de la sorte, mais l’écriture de Cortázar est en soi une aventure hors calibre. Attention, non seulement elle crée la dépendance, mais aussi la multiplication : déterminante du ‘boom littéraire latino-américain’ des années 1960, elle fait peau avec les ponts de Paris depuis la publication de Rayuela (Marelle en français, chez Gallimard).
J’arrive (si vous ne l’avez déjà fait à l’aide du lien précédent, je vous recommande de cliquer et de lire maintenant le texte de la nouvelle) : le récit est un simple schéma de roman policier qui conduit à un assassinat. Or, ce récit est centrée sur la lecture que fait un personnage de façon entrecoupée, dans le train, dans son salon… jusqu’à la dernière ligne. Quand l’assassin décharge son coup fatal, le lecteur se rend compte de quelque chose qui change le tout.
Et les lecteurs de Cortázar que nous sommes, aussi : nous venons de tomber, avec le lecteur de son histoire, dans l’attrape-nigaud d’une ‘mise en abyme’ (oui, avec Y, tel que Guide a lancé l’expression en la récupérant du Moyen Âge). Or, une mise en abyme se caractérise par une histoire imbriquée, éventuellement jusqu’à l’infini : un miroir qui reflète un miroir, etc. Ici aussi, en temps tellement réel que le coup de l’assassin de l’histoire tombe sur le lecteur de celle-ci, car l’histoire était la sienne. Saut de niveau ? Effondrement dans l’abîme d’un autre espace-temps ? Oui, il faut toujours se méfier des temps ‘bifurqués’ ou de ceux qui semblent obstinément parallèles, car ils finissent toujours par se rejoindre et nous rattraper : la réalité est, de loin, beaucoup plus imaginative que la fiction, je vous l’assure.
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mardi 31 mars 2020

Retour sur le fil du temps en période de pause

Diego Velázquez, Les fileuses (ou La fable d’Arachné), détail, ca 1657, El Prado.

N’allez pas me dire que le temps est ce fil de soie qu’une araignée laborieuse issue du Big Bang tisse en enfilant les minutes et les années de notre agenda.
N’allez pas me dire que le temps est cette belle droite, partie vers la croissance de la richesse (et mettant au rencart la distribution de celle-ci, hélas !).
Aujourd’hui, on est sur pause.
Le temps, un long fil droit ? Vraiment ?
Les fileuses (détail), El Prado.
Pour commencer, je vous dirai que les heures n’ont pas toujours eu 60 minutes : dans la Rome antique, par exemple, les douze heures du jour n’avaient pas la même durée en été qu’en hiver, puisqu’elles divisaient la durée de la lumière. Plus près de nous, avant 1883 (normalisation des fuseaux horaires actuels), le temps à Trois-Rivières n’était pas le même qu’à la ville de Québec, mais 5 m 24 s plus tôt, le temps que prend le Soleil pour passer du méridien d’une ville à celui de l’autre.
Pour continuer, le temps a déjà été circulaire : par le retour des oies et des amours (même s’il n’y a plus de saison !) ; par les cycles et les renaissances des conceptions orientales de la vie ; et même par ‘l’éternel retour’ de Friedrich Nitzsche (1844-1900), qui n’a rien à voir avec ces dernières, car il se limite à poser l’insidieuse question suivante, à portée essentiellement éthique : supposez que la mort arrive à votre chevet et vous donne le choix entre disparaître dans le néant ou revivre votre vie à l’infini ; la vie que vous avez faite vous donnerait-elle le courage de choisir l’éternel retour ? Malin ce Nitzsche, eh ?
Et pour finir, Henri Bergson (1859-1941) nous a déjà fait voir  que la ‘durée’, le vrai temps des êtres vivants, n’a rien a voir avec le tic-tac de la montre. La preuve : maintenant qu’on est sur pause, le temps ne file plus comme avant. Il faudrait en profiter, par exemple, car il est plus aisé de réfléchir au sec sur un recoin que dans l’action des rapides.
En effet, la réalité du temps c’est qu’il s’arrête, il trace de profonds méandres et son cours ressemble plus à un zigzag qu’à une droite. Plus encore : le fil du temps bifurque. Rappelez-vous les ‘histoires dont vous êtres le héros / l’héroïne’, où il faut faire des choix, chacun conduisant à un récit différent… Rappelez-vous le jeu d’échecs, dont le nombre de démarches possibles croît à la vitesse de la multiplication d’un virus…
L’araignée du temps sécrète un fil translucide, mais elle tisse avec celui-ci une toile, un ‘jardin aux sentiers qui bifurquent’. La suite, dans le récit du même titre du recueil Fictions, de Jorge Luis Borges (1899-1986).
Ces derniers jours, j’ai reçu des messages des gens que j’avais perdus de vue depuis longtemps, des messages qui disent que c’était bien, les moments qu’on a coïncidé sur le train où vont les choses. Et, oui, c’était bien de les recevoir.
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samedi 28 mars 2020

Des humains et des chevaux


En 1933, en pleine démence du nazisme, l’helléniste allemand Werner Jaeger commençait à écrire une œuvre monumentale, Paideia, non seulement sur l’éducation dans la Grèce antique, mais aussi sur l’ensemble de cette culture, source de notre civilisation et de notre démocratie.
Aujourd’hui, la crise globale que nous vivons nous a retournés à la case de départ et, une fois là, elle a commencé à nous faire comprendre trois choses essentielles : l’importance inouïe de certaines fonctions, comme le camionnage ; la nécessité de redevenir tous plus polyvalents ; la connerie monumentale de saturer la terre avec un tourisme peu respectueux de chaque localité et de l’environnement.
Plus polyvalents, parce que maintenant il faut nous occuper de l’éducation : nous constatons avec horreur que nos enfants ou petits-enfants ne font pas les opérations mathématiques comme nous avons appris à les faire ; que leur écriture est phonétique plutôt que française ; que la bulle de leur galaxie, en résumé, semble avoir pris une certaine distance de la nôtre. Mais commençons par le commencement, n’importe où : par les fables de La Fontaine, par l’explication de la courbe statistique ou par la cinétique du ‘moment angulaire’. Peu importe, à la condition d’être créatifs, de construire des modèles avec les vieilles cochonneries entassées au garage et de sortir le papier d’emballage pour faire de grands dessins.
Au train où vont les choses, d’ailleurs, si le passage de la vague nous permet de retourner à un semblable de normalité pour l’été, je n’exclus pas de voir se greffer une ‘recherche éducative’ à chaque activité sportive, à chaque observation pendant les vacances, les vraies : les aurores boréales, les mouches à feu, les constellations, la simple composition de la terre, révélée par un trou pour planter un poteau ou un arbre…
Je n’exclus pas de voir proliférer à l’écurie des discussions sur l’inertie, sur la mesure du cercle ou sa division en secteurs. Même sur le théorème de Pythagore, hélas, car pour tracer un rectangle de dressage de 20 m sur 40 m ou de 20 m sur 60 m, il faut calculer la diagonale, c’est-à-dire, l’hypoténuse. Une suggestion : notez vos résultats dans les commentaires ci-bas ou ceux du lien Facebook pour démontrer que vous vous souvenez bien de la formule...
Carrière de dressage qui me ramène dans notre sujet à un autre rectangle, celui du Parthénon d’Athènes : ses frises représentent un total de 378 humains et 245 animaux, des chevaux dans la grande majorité. Pas des dieux, des humains et des chevaux. Pourquoi donc ?

 
Parce que, dans la culture grecque classique, l’arété –c’est-à-dire, la vertu, le courage– est attribuée autant aux humains qu’aux chevaux, et ceci même dans l’œuvre d’Homère, le grand poète-éducateur dans le plus pur esprit de la paideia


lundi 23 mars 2020

« Calme, en avant et droit » (Général L’Hotte)


Mon cheval Kopa a les nerfs bien trempés, mais il avait l’œil inquiet sur le plafond et les murs du manège : c’étaient les grandes timbales jouées par les glaçons. La veille, on avait eu un passable verglas et aujourd’hui la glace craquait à toute allure sur la structure métallique.
Question d’œil, nous avons échangé nos positions respectives : Joannie a monté Kopa, en exagérant la correction de ses hanches à droite, déséquilibre que j’ai fini par le transmettre. Alors je me suis vu moi-même de l’extérieur et j’ai compris toutes les remarques de Joannie, que je me suis promis mille fois d’amender.
À la fin, Joannie m’a dit :
— À toi.
Kopa avait oublié la glace qui continuait de tomber et moi aussi, surtout qu’en montant un Kopa bien engagé – postérieurs très avancés sous la masse corporelle – nous sommes partis vraiment vers le haut.
— Tiens bien sa hanche droite – me disait Joannie –, et la rêne diagonale !
J’ai fait de mon mieux – je crois que passablement –, mais j’étais dans une autre dimension, celle d’une impulsion aérienne.
Le calme, l’équilibre, l’impulsion, humm !
Le soir venu, je suis retourné aux écrits de Nuno Oliveira et au volume de son élève Bernard Chiris : « L’impulsion est un état d’esprit, un désir mental et physique du cheval de se porter en avant. » L’art de monter à cheval, Paris, Belin, 2003, p. 303.
Ce qui m’a rappelé en direct la souplesse des bras, tant répétée par Joannie, et la descente des mains des grands maîtres, celle qu’on identifie constamment dans le remarquable manuel graphique de la duchesse de Fitz-James :

Marguerite Augusta Marie Löwenhielm, duchesse de Fitz-James, Principes élémentaires d’équitation, Paris, Plon, Nourrit & Cie, 1892. Composé d’abord pour son fils, le volume contient une centaine de pages de planches multiples qui montrent l’influence de Baucher ; certaines des idées sont reprises après, sur une base photographique, par le Comandant Licart.

Les pieds des photographes

La Verendrye au lac des Bois (détail), Arthur H. Hider (1870-1952), Bibliothèque et Archives Canada Entourés de leurs ar...