Voici, non loin
de la rivière Saint-Maurice, une petite écurie où chevaux et humains vivent des
temps croisés, parallèles à l’occasion. Des chevaux vus de près, touchés,
sentis. Pourquoi des chevaux ? Le narrateur, apprenti de ce monde ancien
devenu secret, aurait du mal à répondre à cette question, mais il garde une
vague intuition, convaincu qu’en apprenant la langue des chevaux on peut
comprendre mieux celle des humains, peut-être aussi mieux se comprendre soi-même.
Cette proximité
des chevaux, celle des lieux – la Mauricie, où le texte a été écrit et il
est le plus souvent lu –, celle du temps du récit – l’actuel pour tous au
moment de la sortie – représentaient tant de zooms sur la réalité directe qu’il
a fallu les compenser en ajoutant de la distance : les lettres adressées à
une amie lointaine qui ouvrent chacun des récits, un style quelque peu
anachronique, des références anciennes…
Est-ce que la
frontière entre les histoires et les lettres qui les introduisent se correspond
avec celle entre la réalité et la fiction ? Dans la stratégie de départ,
oui. Or, les cartes se mêlent rapidement, car la construction des histoires a
requis l’ajout de beaucoup d’éléments de fiction et, de l’autre côté, les
correspondants des lettres ont fini par prendre corps, bien certain que sur une
base autobiographique, car il n’y a pas d’autre matière disponible : on peut seulement dire
avec substance ce qu’on a vécu d’une façon ou d’une autre.
La première
lettre est datée du 18 avril 2019 et l’épilogue clôt le cercle le 21 août, en traversant
ainsi un printemps et un été d’observations et de brouillons. Il fallait par la
suite affiner le texte, longuement, comme un fromage, jusqu’au dépôt de l’encre
sur le papier coupé, broché, couché de ce bouquin déjà en route par-ci, par-là,
à la recherche des lecteurs qui donneront nouvelle vie aux personnages.
Le recueil Le cours du temps, lettres de l’écurie (Trois-Rivières, 2019) réunit sept nouvelles de chevaux racontées dans le temps qui passe, dans l’eau qui passe.
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