dimanche 27 octobre 2019

Écriture, proximité, distance



Voici, non loin de la rivière Saint-Maurice, une petite écurie où chevaux et humains vivent des temps croisés, parallèles à l’occasion. Des chevaux vus de près, touchés, sentis. Pourquoi des chevaux ? Le narrateur, apprenti de ce monde ancien devenu secret, aurait du mal à répondre à cette question, mais il garde une vague intuition, convaincu qu’en apprenant la langue des chevaux on peut comprendre mieux celle des humains, peut-être aussi mieux se comprendre soi-même.


Cette proximité des chevaux, celle des lieux – la Mauricie, où le texte a été écrit et il est le plus souvent lu –, celle du temps du récit – l’actuel pour tous au moment de la sortie – représentaient tant de zooms sur la réalité directe qu’il a fallu les compenser en ajoutant de la distance : les lettres adressées à une amie lointaine qui ouvrent chacun des récits, un style quelque peu anachronique, des références anciennes…


Est-ce que la frontière entre les histoires et les lettres qui les introduisent se correspond avec celle entre la réalité et la fiction ? Dans la stratégie de départ, oui. Or, les cartes se mêlent rapidement, car la construction des histoires a requis l’ajout de beaucoup d’éléments de fiction et, de l’autre côté, les correspondants des lettres ont fini par prendre corps, bien certain que sur une base autobiographique, car il n’y a pas d’autre matière disponible : on peut seulement dire avec substance ce qu’on a vécu d’une façon ou d’une autre.


La première lettre est datée du 18 avril 2019 et l’épilogue clôt le cercle le 21 août, en traversant ainsi un printemps et un été d’observations et de brouillons. Il fallait par la suite affiner le texte, longuement, comme un fromage, jusqu’au dépôt de l’encre sur le papier coupé, broché, couché de ce bouquin déjà en route par-ci, par-là, à la recherche des lecteurs qui donneront nouvelle vie aux personnages.

 
Le recueil Le cours du temps, lettres de l’écurie (Trois-Rivières, 2019) réunit sept nouvelles de chevaux racontées dans le temps qui passe, dans l’eau qui passe.

Les pieds des photographes

La Verendrye au lac des Bois (détail), Arthur H. Hider (1870-1952), Bibliothèque et Archives Canada Entourés de leurs ar...